
In memoriam Rémi Hoffbeck (2004)
Mon ami organiste Rémi Hoffbeck improvise pendant que la foule s’installe dans l’église protestante datant du XIIIe s. Soudain l’orgue se bloque sur une note grave, sinistre même. Puis l’on entend un bruit sourd, comme un corps qui chuterait lourdement sur le parquet de la tribune. Puis retentit un cri terrible, celui d’une amie du musicien, chargée de lui tourner les pages. Elle alerte le public, mais surtout Régine, l’épouse de Rémi, qui s’apprêtait à chanter avec l’accompagnement de l’orgue : « Rémi est tombé, viens vite ! »
Je m’élance vers l’escalier menant à la tribune. Une infirmière qui habite près de chez moi me suit. Le spectacle est poignant : l’organiste est étendu sur le dos, comme désarticulé après sa chute du haut de la console d’orgue. L’infirmière et son mari, lui aussi accouru, tentent la réanimation par le bouche-à-bouche. Le pire est à craindre. Le SAMU mettra un mauvais quart d’heure avant d’arriver. Rémi s’étant blessé aux lèvres en tombant, l’infirmière est maculée de sang. Régine est auprès de moi. Elle ne veut pas s’approcher, elle ne veut pas voir…Quand au bout d’un autre quart d’heure le médecin vient nous annoncer le décès, Régine pousse un cri strident et entre dans des convulsions extrêmes. Le pasteur Luc Wenger, accouru de chez lui, m’aide à la maîtriser…C’est un moment de douleur absolue. Le pasteur fait sonner la cloche, allume des chandelles sur l’autel, puis envoie vers les hauts parleurs une cantate de Bach.
Mes larmes couleront au moment où il faut annoncer à la foule bouleversée, sortie sur le parvis, que l’organiste n’avait pas pu être ramené à la vie et qu’en conséquence la visite guidée musicale allait devoir s’arrêter là.
Cela s’est passé le 3 juillet 2004. Depuis cette fin brutale, Rémi est resté dans mon cœur, en tant qu’organiste aux improvisations géniales et pour notre fidèle amitié.